samedi 21 septembre 2013

L'Etabli - Robert Linhart (English translation)

 L'Etabli - Robert Linhart  (English translation)
Les Editions de Minuit, Collection "double",  187 pages

Robert Linhart describes his experience of an "établi" in the Citroën 2CV car Choisy assembly plant. The "établissment" is the immersion movement of leftist intellectuals in the working class in the wake of May 68.

A little bit skeptical, I start  the book: These intellectuals who slum at the plant may have a simplistic, idealized  and -frankly speaking-  childish view of the proletariat world. I also fear the dogmatic rehashed, used, speech slogan-speeches. 

From the first pages, we are reassured that Robert Linhart's approach seems sincere, lucid and above all humble . No sense of superiority or arrogance from the Ecole Normale graduate.  Therfore, a little ashamed, I must admit that  stereotypes and prejudices were mostly on my side.

Never succumbing to the temptation of his own staging, Robert Linhart describes his experience of the world of the assembly: fraternity, fights but also  doubts, defeats against the relentless repression of the organization (several times a parallel is drawn with the world of prison). The parts dealing with author's sincerity are very touching indeed.

The brutality and cynicism of a system focused exclusively on profit. Humiliation and blackmail exerted on workmen intentionally weakened, especially the immigrant population. The mindlessness caused by the line work. All this seems to produce a certain fatalism among workers, even resignation. 

But renoucement is never complete and the most crushed men often retain a capacity of rebellion in them. And this is the message of hope of the book. 

Thus, when the Director requires the "recovery" - the workers must daily give  three quarters of an hour of work to recover the production volume lost during the May 68 strikes - the discontent broke out. An opportunity for Robert who,  helped by some fellows , tries to organize a stop of the production line. But how to engage men and women so oppressed? Respect for dignity is the simple rallying creed in all the languages ​​of  proletarian Babel. Successfully... until the outbreak of repression. 

Throughout the description of his courageous experience of struggle and resistance, Robert Linhart portays tenderly some characters who engaged with him or who simply crossed his journey: Georges, Stepan, Pavel, Christian, Primo, Ali (whose memory of the great black dog gives a sickening example of colonization), Mouloud, Sadok, Simon, Jojo...

 A reminder that the mass of workers is composed of individual fates :

     
The bourgeois always think they have a monopoly of personal routes. What a farce! They have the monopoly of public speech, that's all. They spread. Others live their story with intensity, but in silence 


Read also : Florence Aubenas  in "Le Quai de Ouistreham" (Editions de l' Olivier) is echoing "L'établi" a testimony-immersion in the most dominated labour class of France, for decades later on crisis background.

Please excuse my English, correct it and feel free to post any comment, thanks :-)

L'Etabli - Robert Linhart

L'Etabli - Robert Linhart
Les Editions de Minuit, Collection "double",  187 pages

Robert Linhart décrit son expérience d'"établi" à l'usine Citroën Choisy d'assemblage de 2CV. L'établissement est le mouvement d'immersion des intellectuels gauchistes dans le monde ouvrier dans le sillage de Mai 68. 

J'attaque le livre un peu sceptique: Ces intellectuels qui s'encanaillent à l'usine ont peut-être une vue simpliste, idéalisée et pour tout dire infantilisante du prolétariat. Je crains aussi les discours-slogans dogmatiques ressassés, usés. 

Dès les premières pages, on est rassuré: la démarche de Robert Linhart apparait sincère, lucide et, surtout, très humble. Aucun sentiment de supériorité ou d'arrogance de la part du Normalien. Du coup, un peu honteux, je réalise que les clichés et préjugés étaient surtout de mon côté.

Sans jamais succomber à la tentation de sa propre mise en scène, Robert Linhart décrit son expérience de l'univers de l'usine: la fraternité, les combats mais aussi les doutes, les échecs face à l'implacable répression de l'organisation (à plusieurs reprises un parallèle est fait avec le monde pénitentiaire). Les passages de doutes de l'auteur sont très touchants de sincérité.

La brutalité et le cynisme d'un système organisé autour du seul profit. Les humiliations et le chantage exercés sur des ouvriers intentionnellement fragilisés, en particulier la population immigrée. L'abrutissement engendré par le travail à la chaîne. Tout cela semble produire un certain fatalisme chez les ouvriers, de la résignation même. 

Mais le renoncement n'est jamais complet et les hommes les plus écrasés conservent souvent une capacité de révolte en eux. Et c'est bien là, le message d'espoir du livre.

Ainsi, quand la Direction impose la "récupération" - les ouvriers devant donner chaque jour trois quarts d'heure de travail à l'entreprise afin de rattraper la production perdue pendant les grèves de Mai 68 - la grogne éclate. Une opportunité pour Robert qui, aidé de quelques camarades, tente d'organiser un mouvement d'arrêt de la chaîne de production. Mais comment engager des hommes et femmes accablés? Le respect de la dignité, voilà ce qui sera tout simplement le credo de ralliement, dans toutes les langues du Babel prolétaire. Avec succès... jusqu'au déclenchement de la répression.

Tout le long de la description de sa courageuse expérience de la lutte et de la résistance, Robert Linhart s'attarde avec tendresse sur quelques personnages qui se sont engagés à ses côtés ou qu'il a tout simplement croisés: Georges, Stepan, Pavel, Christian, Primo, , Ali (dont le souvenir du grand chien noir donne une illustration nauséeuse de la colonisation), Mouloud, Sadok, Simon, Jojo...

Un rappel que la masse des ouvriers est constituée de destins individuels:
 Les bourgeois s'imaginent toujours avoir le monopole des itinéraires personnels. Quelle farce ! Ils ont le monopole de la parole publique, c'est tout. Ils s'étalent. Les autres vivent leur histoire avec intensité, mais en silence

A lire aussi: Florence Aubenas entreprend dans "Le quai de Ouistreham" (Editions de l'Olivier) en écho à "L'établi" une l'immersion-témoignage dans les classes laborieuses les plus dominées de France, quarante ans plus tard sur fond de crise.

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